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Visite du Paradisio capitaliste d'Eric Domb

Vous avez déjà vu le splendide parc animalier Paradisio, près de Mons ? Nous vous en proposons une visite inédite : le Paradisio capitaliste d'Eric Domb, patron du domaine.

1. La Cité interdite

Le Jardin chinois - le plus grand d'Europe - est le fleuron de Paradisio, qui lui a permis de cartonner à 635.000 visiteurs en 2007. Imaginez : quelque 800.000 galets de mer ont été posés un à un à la main sur son sinueux parcours.

Cela dit, ce jardin mériterait d'être rebaptisé la «Cité interdite». Pour ses allures de palais impérial chinois, bien sûr. Mais surtout parce qu'il a été construit… sans le moindre permis d'urbanisme. Pas plus d'ailleurs que les volières géantes ou le jardin indonésien.

Si vous-même faites construire votre maison sans permis, vous pouvez vous attendre à recevoir la visite de bulldozers envoyés par les autorités. Mais Eric Domb, patron du parc, ne s'en fait pas trop. «J'ai contacté le fonctionnaire délégué de la Région wallonne et lui ai remis les plans des volières et du Jardin chinois, explique-t-il à La Libre Belgique. Il a répondu qu'il ne lui était pas possible de délivrer un avis conforme et, tant que nous n'obtiendrions pas un Plan communal d'aménagement (PCA), nous ne recevrions pas d'avis favorable. J'ai donc... effectué les travaux.»

Ce juriste de formation a beau savoir que c'est illégal, il argue que «dans notre secteur, les nouveautés sont une condition de survie essentielle». Un peu facile, direz-vous. Pourtant, ça marche… La Cité interdite continue d'enrichir Wildo Properties, le holding d'Eric Domb qui détient 41% du capital de la S.A. Parc Paradisio.

2. Les autruches politiques

A force de s'estimer au-dessus des lois, on finit par être imprudent. Dans l'interview à La Libre Belgique, Domb précisait avoir effectué les travaux «au vu et au su de tous. Le ministre André Antoine est informé.»

Ouille ! Voilà de quoi mettre dans l'embarras le ministre wallon de l'Aménagement du territoire (cdH). Le jour même, celui-ci niait formellement avoir accordé un blanc-seing au patron des patrons (Domb préside l'Union wallonne des entreprises - UWE) et décrétait : «Il n'y a pas d'urbanisme de classe.» Sans doute notre autruche politique avait-elle la tête plongée dans le sable le jour où le remuant patron l'avait mis dans la confidence. Et Paradisio a aussitôt rédigé un communiqué pour confirmer la nouvelle version officielle. Belle réciprocité amoureuse…

En avril, quand Rudy Demotte (PS) avait critiqué un discours farouchement antisyndical de Domb, Antoine ne s'était-il pas désolidarisé de son ministre-président ? Depuis, Demotte et Domb se sont d'ailleurs réconciliés, scellant leur amitié devant les caméras télé au… Jardin chinois de Paradisio.

Le courant semble également bien passer avec Jean-Claude Marcourt (PS). «C'est un patron atypique qui incarne bien une forme de dynamisme wallon», déclarait le ministre de l'Economie quand Domb a été désigné manager de l'année. Et de rappeler fièrement que Paradisio a eu un coup de pouce de la Région : la SRIW (Société régionale d'investissement de Wallonie) a pris 15 % de son capital.

Il faut dire que le président de l'UWE est un chaud partisan de cette politique de cadeaux aux entreprises qui caractérise le plan Marshall. Et il négocie actuellement avec la SRIW un prêt de plusieurs millions d'euros pour financer une nouvelle attraction axée sur l'Afrique.

3. Le vautour moine, espèce protégée

Le vautour moine est l'une des nombreuses espèces protégées qu'Eric Domb est fier d'abriter à Paradisio. A propos de moine, le parc a justement été fondé en 1993 sur le site de l'ancienne abbaye de Cambron. Un site classé. Une espèce protégée, en quelque sorte… Ce qui rend d'autant plus préjudiciables des aménagements sans permis.

Justement, l'association Marcel Thémont, chargée de la défense du patrimoine local, n'est pas tendre pour la politique touristique de Paradisio. Un de ses membres, Christian Cannuyer, égyptologue et spécialiste des têtes couronnées, reproche à Domb d'avoir fait preuve d'une mégalomanie préjudiciable pour ce haut lieu de la mémoire cistercienne : «De par la multiplication d'espaces exotiques et inauthentiques, le site de l'ancienne abbaye des moines de Cambron-Casteau a perdu au fil du temps sa cohérence paysagère et architecturale.»

Il déplore par exemple la reconstitution, au milieu du grand étang, d'un baleinier dont le gigantisme «a complètement gâché le panorama qu'offrait cette partie du domaine. La transformation de l'intérieur du château des comtes du Val de Beaulieu (1854) pour y aménager un aquarium constitue une autre dérive.»

Et pour Cannuyer, le fait que la Région wallonne ait introduit une procédure visant à déclasser le site n'est pas une coïncidence…

4. La volière des oiseaux de proie

Imaginez : vous pénétrez dans une immense volière où vous vous trouvez en contact direct avec des oiseaux de proie volant en toute liberté. Si vous voulez connaître cette sensation frissonnante sans payer les 19,80 € d'entrée à Paradisio, il vous suffit d'écouter les propos d'Eric Domb.

Car à suivre les préceptes du président de l'UWE, les travailleurs se trouveraient rapidement, sans défense, dans la ligne de mire des vols d'employeurs rapaces. Exemples : limiter les allocations de chômage, faciliter les licenciements en réduisant la durée de préavis, détricoter les réglementations en matière d'horaires et d'heures supplémentaires, refuser les représentants syndicaux dans les PME... Pour lui, d'ailleurs, la FGTB cristallise tout le mal wallon : «Il faut démasquer les impostures et affirmer que ce syndicat, qui poursuit toujours l'objectif de collectiviser des pans entiers de l'activité, refuse les impératifs de l'économie de marché.»

Contrairement aux autruches politiques, l'homme veille à ce que ses actes soient conformes à son discours. Ainsi, en 2006, lorsque la FGTB envisage un piquet de grève à Paradisio, Domb crie immédiatement au «racket syndical». Le syndicat réclamait simplement une revalorisation des salaires, notant que «certains travailleurs perçoivent 7,5 euros brut l'heure, moins que les titres-services».

En examinant les comptes 2007 de la S.A. Parc Paradisio, on constate aussi que le taux de rotation du personnel atteint… 525 % (478 embauches et 476 départs sur l'année pour un effectif de 91 travailleurs).

On y découvre encore que Domb ne défend pas la réduction de l'impôt des sociétés que pour chauffer les bancs de l'UWE. En cumulant quatre types de déductions fiscales (intérêts notionnels, doublement des amortissements, déduction pour investissements et déduction de pertes antérieures), l'entreprise n'a pas payé le moindre impôt sur un bénéfice de 2,4 millions €. Faut dire, Domb a débuté sa carrière comme expert fiscal chez Coopers & Lybrand…

5. Initiation aux noms d'oiseaux

Le syndicat n'est pas le seul à être accusé de pratiquer le racket. C'est aussi le lot des autorités communales de Brugelette, l'entité où est située Paradisio. Il est vrai que par ses activités, Domb est initié aux noms d'oiseaux.

En cause ? Lorsque la sucrerie de Brugelette a fermé ses portes début 2008, la commune a perdu une rentrée fiscale importante (230 000 €). Elle a donc eu l'idée d'instaurer une taxe de 75 cents sur chaque entrée au parc. Comme cela se fait pour Walibi, Aywaille ou les Grottes de Han.

Pour le patron de Paradisio, cette décision est illégale (c'est vrai qu'il s'y connaît en illégalité) et constitue un racket à des années-lumière du Plan Marshall qui impose la paix fiscale. Il préférerait, bien sûr, que la commune déclare la guerre fiscale à la population locale.

Mais pour le bourgmestre André Desmarlières (PS), une entreprise privée cotée en bourse a le devoir de contribuer à l'effort financier au sein du territoire qui l'abrite. Il craint toutefois que vu «la puissance financière et l'influence économique» de Domb, ainsi que le soutien apparemment inconditionnel dont il bénéficie à la Région wallonne, ce ne soit «le pot de terre contre le pot de fer».

Marco Van Hees
Publié dans Solidaire le 11 septembre 2008

07.09.2008. 20:32

 

Commentaires

tanguy 27.06.2009. 08:33

bravo
tres bel article
ces sales riches devraient quitter le Hainaut; le PS peut tres bien subvenir aux besoins de ce peuple d'assistés hennuyers. D'ailleurs le Hainaut, c'est beau !
A quand un article sur Donfus, Happart, Van Cau, Daerden, Coeme, etc etc??

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