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Des politiciens immoraux représentés par des personnes morales

Des mandataires PS et MR ont créé des sociétés siégeant à leur place dans des organismes publics. Avec à la clé, des avantages salariaux et fiscaux.

Quels sont les points communs entre les députés provinciaux Georges Pire (MR) et André Gilles (PS), l’ancien bourgmestre de Seraing Jacques Vandenbosch (PS), le bourgmestre de Blegny Marc Bolland (PS) et le bourgmestre faisant fonction à Ans Stéphane Moreau (PS)?

D’abord, ils exercent tous des mandats politiques dans la région liégeoise. Beaucoup de mandats même: les quatre premiers totalisent 91 mandats publics ou privés (Moreau est absent de la liste des mandats à déposer obligatoirement à la Cour des comptes).

Mais surtout, ils font exercer leurs mandats par des sociétés qu’ils ont eux-mêmes créées. Prenez André Gilles. Si vous vous glissez à une réunion du conseil d’administration de Tecteo (ex-Association liégeoise d’électricité), vous verrez sur le siège du président quelqu’un qui lui ressemble fort. Mais est-ce André Gilles ou le représentant de la sprl créée par… André Gilles?

Trends-Tendances affirme que c’est ce second. Le mandataire socialiste dément dans La Libre Belgique. Tout en défendant cette pratique qui «est une facilité et [qui] assure plus de transparence (sic)», il précise: «Je ne suis pas représenté à Tecteo par une sprl, et pas davantage à la SPI. Ma sprl intervient dans deux sociétés qui n’ont rien à voir avec des mandats publics.»

Sûr? Parmi les 32 mandats de Gilles, on trouve un poste d’administrateur à la Socofe, un holding financier qui fédère des intérêts communaux et intercommunaux wallons. Un mandat public, donc.

Une sprl créée deux jours avant sa démission

Nous avons retrouvé dans le Moniteur du 2 novembre 2007 cet extrait d’un procès-verbal du conseil d’administration de la Socofe: «Le conseil prend acte de la démission de leur mandat d’administrateur de messieurs André Gilles au 1-6-2007 et Jean-François Escarmelle au 1-7-2007. Afin de pourvoir à leur remplacement, il désigne à titre provisoire la sprl SGM représentée par monsieur André Gilles et la sprl Gestion-Innovation représentée par monsieur Jean-François Escarmelle.»

Cette perle est signée par le président de la Socofe, Jean-Claude Marcourt, ministre wallon qui passe plutôt pour un rénovateur «clean» au sein du PS. Le Moniteur nous apprend également que la sprl SGM a été créée par André Gilles, actionnaire unique, le 29 mai 2007. Deux jours avant sa pseudo-démission.

Intérêt de ce procédé? Ils sont multiples. D’abord, la rémunération est moins taxée en société qu’en personne physique. Ensuite, il permet de contourner la règle qui limite le revenu total d’un mandataire public à une fois et demie le salaire d’un député. Enfin, André Gilles a lui-même expliqué à la télévision locale RTC que ce procédé permettait de mettre son patrimoine privé à l’abri des risques qui guettent les administrateurs de société.

Bref, si un jour ce bon socialiste est accusé de mauvaise gestion, voire de malversations, il sera financièrement intouchable, le magot étant planqué dans une mal nommée «personne morale», sa société SGM.

Marco Van Hees
Publié dans Solidaire le 19 décembre 2007

Post Scriptum (PS)

Suite à cet article et à un communiqué de presse basé sur celui-ci, ainsi que les échos qu'ils ont eu dans les médias (jusque-là, ceux-ci n'avaient évoqués que les cas de politiciens liégeois sans évoquer le cas du président de l'Idea), Jean-François Escarmelle s'est fait tirer les oreilles par son président de parti et a déclaré qu'il renonçait à son montage fiscal.

09.09.2008. 23:57

 

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