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La
Belgique occupe l'avant-dernière place européenne en matière de fiscalité
verte, selon une récente publication d'Eurostat. La nécessité de relever son
niveau fait une quasi-unanimité dans le monde politique. Et certes, de telles
taxes semblent joindre l'utile (alimenter les finances publiques) à l'agréable
(oeuvrer pour l'environnement). En réalité, elles sont aussi injustes
fiscalement qu'inefficaces pour l'environnement.
L'écofiscalité
est injuste ! Car
elle repose sur des taxes indirectes. Le ministre des Finances Koen Geens
indique ainsi qu'il veut «faire baisser la fiscalité sur le travail et
à la diriger vers d’autres sources, comme le patrimoine, la consommation,
mais aussi l’environnement » (Le Soir, 29/11/2013). Cela revient à réduire
l'impôt des personnes physiques, plus juste car progressif (un revenu plus élevé
est soumis à un taux plus important), en augmentant des taxes indirectes,
socialement injustes. Or, plusieurs études montrent que la progressivité de
l'impôt a déjà sérieusement diminué ces dernières années en Belgique.
Parmi
la fiscalité indirecte injuste, certaines taxes vertes appartiennent aux plus
injustes. Ainsi, si la TVA n'est pas progressive mais proportionnelle (un revenu
plus élevé est soumis à un taux identique qu'un bas revenu), la taxe déchets,
par exemple, est carrément régressive (un revenu plus élevé est soumis à un
taux plus bas). Pour un Albert Frère, une telle taxe relève de l'homéopathie.
Alors que pour un petit pensionné, la facture est salée.
L'écofiscalité
est inefficace ! Elle
repose, en effet, sur un postulat étrange: au lieu de mettre en oeuvre
une politique positive en faveur de l'environnement, les autorités décrètent
qu'il est permis de polluer, à condition de payer. Ainsi, sous prétexte de
responsabiliser le citoyen via l'impôt, les pouvoirs publics se déchargent de
leur propre responsabilité, qui est pourtant essentielle.
Conséquence:
l'Etat remplit peut-être ses caisses, mais il ne s'attaque pas aux problèmes
de fond. Prenons l'exemple des taxes sur le carburant. Pour les plus riches, il
suffit de payer pour continuer à polluer. Quant aux entreprises, elles peuvent
déduire la TVA sur le carburant et sur les accises ˗contrairement à
la population˗ et perpétuer le règne de «Tout-en-camion».
Mais
surtout, «l'environnement» social pour préserver l'environnement
est absent. Ainsi, les pouvoirs publics offrent peu d'alternative à
l'automobiliste, à défaut d'offrir des transports en commun fréquents,
ponctuels, bon marché. Le gouvernement Di Rupo n'a-t-il pas réduit la dotation
de la SNCB? à l'inverse, la
promotion des transports publics nécessiterait une politique proactive visant,
par exemple, à réduire l'extrême flexibilité exigée aux salariés (heures
supplémentaires, travail à pause...) ou à prévoir des crèches dans les
entreprises. On en est loin.
L'écofiscalité
est une « alibifiscalité» ! Le
cas des taxes poubelles est éclairant. En quoi une telle redevance forfaitaire
réduit-elle la production de déchets ? On pourrait concevoir, plutôt, que
chaque ménage reçoive un quota de sacs gratuits, ne déboursant que pour d'éventuels
sacs supplémentaires, mais sans payer de taxe forfaitaire, le coût de la
gestion des déchets étant financé par l'impôt progressif.
La
politique suivie est pourtant inverse, l'idéologie libérale favorable à une
taxation accrue de la consommation ayant gagné la gauche traditionnelle, écologiste
comme socialiste. Au nom de la compétitivité exigée par le monde patronal (réduire
le coût fiscal du travail) et d'une pseudo-défense de l'environnement. Reste,
pour l'écofiscalité, sa fonction d'alibi d'une politique antisociale, du même
ordre que le fameux «index santé» inventé naguère par le
gouvernement Dehaene.
Pendant
ce temps, quelques grandes familles (ex-)industrielles figurant parmi les plus
premières fortunes du pays, comme les Boël ou les Janssen, laissent la Spaque
assainir leur friches hyperpolluées aux frais du contribuable. Le principe du
«pollueur payeur» semble indigne de leur grandeur...
Marco
Van Hees (29/11/2013)
05.03.2014. 10:28 |